Services financiers et travail flexible ? Pas aussi improbable que vous pourriez le penser

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Services financiers et travail flexible ? Pas aussi improbable que vous pourriez le penser

Temps de lecture :  4 Minutes

Que se passerait-il si un secteur connu pour ses pratiques de travail traditionnelles essayait quelque chose de nouveau ? Les sociétés financières du monde entier se tournent vers l’avenir et font exactement cela, indique James Ashton

 

Il semble que le secteur des services financiers ne se prête pas facilement au travail flexible. La culture des longues heures et des exigences de sécurité signifie que les banques et les assurances sont des secteurs prônant le présentéisme absolu, alors que les avancées technologiques et la pensée éclairée appartiennent à d’autres secteurs, où le personnel est depuis longtemps détaché de son bureau.

Mais un changement s’opère parmi les acteurs financiers traditionnels, notamment en raison de la concurrence des rivaux arrivistes. L’ère de la banque ouverte (où une nouvelle génération de services se connectera au compte bancaire principal d’un client, comme les applications téléchargées sur un smartphone) est imminente. Dans le même temps, les géants de la technologie recherchent des opportunités dans l’espace des paiements grâce aux nouvelles monnaies numériques telles que le bitcoin.

Avantages flexibles

Les leaders du marché ne sont pas aveugles au problème de l’attraction et de la rétention de la prochaine génération de talents, qui peuvent exiger les avantages en nature d’une startup au lieu d’une rémunération plus importante. Selon une enquête de la société de recrutement américaine Robert Half Financial Services, 95 % des patrons estiment qu’il est difficile de trouver des recrues de la génération Y qui soient qualifiées, et 58 % disent que c’est très difficile(1). Après le salaire, les primes, l’avancement professionnel et les responsabilités professionnelles, les personnes interrogées ont indiqué que le cinquième facteur le plus important dans le choix de travailler pour une firme financière était la flexibilité de l’espace de travail.

Adopter de telles pratiques est plus facile à dire qu’à faire. Après tout, l’attitude de disponibilité absolue des banquiers fait partie intégrante de la culture. La nécessité de se connecter à des systèmes ultra-sûrs ou de négocier sur le parquet de la Bourse a pour implication que, pour les banques d’investissement, seuls les analystes de recherche qui ont de longs rapports à préparer, ou les as des fusions et acquisitions qui réalisent des affaires en emmenant leurs prospects au restaurant, se prêtent facilement au travail à distance.

Les premiers efforts visant à introduire de la flexibilité consistaient à réduire l’engagement 24 heures sur 24, en particulier pour le personnel subalterne. Il y a cinq ans, Goldman Sachs a introduit une règle du samedi qui obligeait les analystes et les associés à ne pas être au bureau à partir de 21 h le vendredi jusqu’à 9 h le dimanche. Les bulge bracket banks (les banques d’investissement multinationales les plus importantes et les plus rentables au monde) sur le fait qu’elles ont fait des progrès. Le Crédit Suisse emploie 14 000 personnes dans le cadre de son programme Smart Working, qui permet aux employés de choisir leur propre espace de travail. La Deutsche Bank offre une formation en gestion du stress et affirme que 90 % des employés reviennent après le congé parental, la plupart d’entre eux dans le cadre d’un programme flexible.

Services financiers et travail flexible ? Pas aussi improbable que vous pourriez le penser

Les acteurs financiers traditionnels adoptent le travail flexible

 

Travail souple

Mais ce sont les entreprises qui emploient des armées de consultants ou qui sont au service d’une vaste clientèle de détail qui semblent montrer le chemin. Selon une étude récente de Working Families, une association caritative britannique œuvrant à un équilibre entre vie professionnelle et vie privée, les 10 principaux employeurs en faveur du travail flexible comptent American Express, Barclays, Deloitte, EY, Lloyds Banking Group et la Royal Bank of Scotland. L’étude a également révélé que seulement 17 % des professionnels de la finance et de la comptabilité travaillent à distance au moins une fois par semaine, ce qui équivaut à la moitié de la moyenne britannique(2).

Le télétravail (lors duquel les banques permettent à leur personnel de travailler à domicile ou dans des centres de travail dédiés plus proches de chez eux) est une réalité aux États-Unis depuis plus d’une décennie. C’est d’ailleurs la Bank of America qui a ouvert la voie. Les avantages sont évidents : frais de déplacement inférieurs, plus de temps pour travailler, et augmentation mesurable de la productivité et du bonheur.

Mais il y a des risques. L’augmentation de la fréquence des cyberattaques signifie que les services informatiques des banques sont confrontés à des problèmes croissants. Elles doivent assurer la sécurité du réseau pour maintenir les normes exigées par les organismes de réglementation. Pourtant, le nombre supérieur d’employés travaillant à distance entraîne l’augmentation des connexions à partir d’une multitude de points d’entrée : à domicile, en déplacement, ou via des ordinateurs portables personnels ou des tablettes informatiques. Et même si le réseau est protégé, les responsables des ressources humaines doivent réfléchir à la manière de sensibiliser les employés, à distance ou non, aux tentatives d’hameçonnage. La solution, comme de nombreuses banques sont en train de le découvrir, consiste à adopter la sécurité numérique et physique associée à l’espace de travail flexible d’un bon fournisseur.

Un changement est en cours, c’est une certitude, tout comme le fait que les clients des banques échangent les files d’attente aux guichets contre les applications mobiles. En première ligne, Lloyds préfère parler de « travail souple ». La banque affirme que plus d’un tiers de sa main-d’œuvre profite du télétravail, d’un temps partiel, d’heures réduites ou d’heures comprimées, ce qui correspond à un temps plein concentré en moins de cinq jours. Elle a consacré 1 milliard de livres en trois ans à une optimisation de la technologie permettant d’améliorer cette flexibilité. D’autres bailleurs de fonds suivront.

 


James Ashton est l’ancien rédacteur en chef du London Evening Standard et de The Independent au Royaume-Uni. Il écrit actuellement des articles pour les quotidiens britanniques The Sunday Telegraph et The Times.

Sources :

(1) https://www.roberthalf.com/blog/management-tips/skilled-candidates-in-short-supply

(2) https://www.workingfamilies.org.uk/employers/benchmark/the-top-30-employers-in-2017/